Les réfugiés ont le droit au retour, mais devraient être libres de choisir d’autres options
(Katmandou, le 17 mai 2007) – L’offre des Etats-Unis d’accueillir 60 000 réfugiés bhoutanais a donné espoir à un grand nombre des 106 000 réfugiés qui vivent au Népal depuis plus de 16 ans, mais elle a aussi ravivé les tensions dans les camps, affirme Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. Les réfugiés qui insistent sur le rapatriement comme étant la seule solution acceptable ont menacé et intimidé ceux qui expriment leur soutien à la réinstallation aux Etats-Unis.
Les réfugiés ont fondamentalement le droit de retourner dans le pays qui les a expulsés. Mais tous les réfugiés ont aussi le droit de faire des choix essentiels pour leurs vies sans être menacés ni intimidés.
Bill Frelick, directeur de la division Réfugiés à Human Rights Watch
La crise des réfugiés bhoutanais a démarré en 1991 quand le Bhoutan a commencé à expulser des personnes de l’ethnie népalaise, politique qui a abouti à l’expulsion d’un sixième de la population du pays. Mais depuis l’annonce de l’offre des Etats-Unis en octobre 2006, des groupes de réfugiés qui soutiennent que la seule solution acceptable est le retour au Bhoutan ont menacé des réfugiés favorables à la réinstallation.
« Les réfugiés ont fondamentalement le droit de retourner dans le pays qui les a expulsés », a déclaré Bill Frelick, directeur de la division Réfugiés à Human Rights Watch. « Mais tous les réfugiés ont aussi le droit de faire des choix essentiels pour leurs vies sans être menacés ni intimidés. »
Le rapport de 90 pages, intitulé « Last Hope: The Need for Durable Solutions for Bhutanese Refugees in Nepal and India » (« Dernier espoir : La nécessité de solutions durables pour les réfugiés bhoutanais au Népal et en Inde »), aborde les solutions possibles à cette situation prolongée des réfugiés et les choix qui se présentent maintenant à eux. Ce rapport décrit les conditions des réfugiés népalais qui languissent en exil au Népal et en Inde, et fait état de la discrimination permanente contre les Népalais qui vivent encore au Bhoutan, dans la peur d’être eux aussi dépouillés de leur citoyenneté et expulsés du pays.
« Bien le rapatriement soit la meilleure option pour la plupart des réfugiés, celle-ci n’est viable que si le Bhoutan remplit son devoir de garantir les droits humains des rapatriés », a affirmé Frelick. « En attendant, le rapatriement au Bhoutan ne peut pas être mis en avant comme une solution durable pour les réfugiés bhoutanais au Népal. »
Jusqu’ici, le Bhoutan n’a pas autorisé un seul réfugié à retourner au pays. En conséquence, les réfugiés ont supporté des années dans des camps surpeuplés sans perspectives de solutions. Le rapport expose la vie dans les camps, la violence domestique et d’autres problèmes sociaux qui surgissent après des périodes prolongées dans des camps fermés.
« Nous ne voulons pas dépendre d’autres personnes », a dit un réfugié bhoutanais à Human Rights Watch. « Nous avons passé la moitié de notre vie comme réfugiés. Nous ne voulons pas de cette étiquette sur le front de nos enfants. Nous voulons qu’ils soient des citoyens fiers. »
Depuis l’annonce de l’offre de réinstallation faite par les Etats-Unis, les tensions dans les camps se sont accrues. Ceci est dû en partie aux rumeurs et aux fausses informations sur la nature de l’offre elle-même. C’est dû aussi à l’intimidation exercée par des groupes activement opposés à la réinstallation et qui maintiennent que la seule solution acceptable est le retour au Bhoutan.
« Les gens ne se sentent pas en sécurité, » a dit un jeune homme. « Si d’autres personnes entendent que vous cherchez d’autres options que le rapatriement, ils vont vous condamner parce que vous ne soutenez pas le rapatriement, ou parce que vous affaiblissez les perspectives de rapatriement. D’autres vont vous accuser de ne pas aimer votre pays. »
Human Rights Watch a appelé le gouvernement népalais à poursuivre les intimidateurs qui menacent ou maltraitent ceux qui exercent leurs droits à la liberté d’opinion, d’expression et d’association.
« Avant de pouvoir parvenir à des solutions, le Népal doit garantir une sécurité suffisante dans les camps pour permettre aux réfugiés d’exprimer leurs opinions et d’échanger librement des informations », a insisté Frelick.
Le rapport aborde les solutions éventuelles à cette situation prolongée des réfugiés et les choix qui se présentent maintenant à eux.
« Pour être efficace, l’offre de réinstallation des Etats-Unis ne peut fonctionner de façon isolée », a dit Frelick. « Les réfugiés bhoutanais ont besoin de véritables choix. »
Ceci requiert une stratégie tripartite. Premièrement, la réinstallation devrait être une option réelle pour autant de réfugiés qui le souhaitent. Ceci signifie que d’autres pays devraient s’unir dans un effort coordonné pour maximiser le nombre de lieux de réinstallation. Les réfugiés bhoutanais qui vivent à l’extérieur des camps au Népal et en Inde devraient aussi y avoir droit. Le Népal devrait coopérer à l’option de réinstallation, en particulier en accordant sans délai des permis de sortie aux réfugiés dont la candidature à la réinstallation est acceptée.
Deuxièmement, le Népal devrait accorder la citoyenneté aux réfugiés qui expriment une préférence pour une intégration locale plutôt que pour une réinstallation ou un rapatriement. Et enfin, les Etats-Unis, l’Inde et d’autres pays devraient redoubler d’efforts pour persuader le Bhoutan de permettre aux réfugiés qui veulent être rapatriés de le faire dans des conditions qui soient compatibles avec la législation relative aux droits humains.
« La possibilité que beaucoup de réfugiés puissent maintenant choisir d’autres options devrait grandement faciliter l’acceptation du rapatriement par le Bhoutan », a dit Frelick. « Les pays de réinstallation devraient faire pression sur le Bhoutan pour trouver une solution véritablement globale à cette situation prolongée des réfugiés. »
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